L'une des caractéristiques des crises est qu'elles déclenchent des émotions. L'une des caractéristiques des émotions est qu'elles compliquent la communication entre les acteurs. Ajoutons, pour compléter le tableau, que tous nous n'avons pas les mêmes émotions à un moment donné.
Tout cela n'aide pas à travailler harmonieusement dans le contexte où nous sommes. Pour ne pas se laisser entraîner dans la cacophonie émotionnelle ambiante, identifions-les. La séquence classiquement décrite est la suivante. Dans un premier temps, face à la crise, le mode de défense le plus archaïque est le déni. On refuse de voir la réalité telle qu'elle est pour rester dans une vision du monde moins perturbante. Réaction souvent constatée dans le monde de la finance après 2008 : « Une fois la perturbation passée, tout redeviendra comme avant ». Puis vient la colère (« c'est inacceptable ! ») et, avec elle, la recherche de responsables auxquels on donnera volontiers le rôle de bouc émissaire. La colère est suivie de la tristesse. La situation est vécue comme déprimante avec un sentiment d'impuissance qui domine. Suivi de l'anxiété. Inquiétudes sur ce qui se passe, sur la façon dont les choses vont évoluer et sur les conséquences pour soi et son entourage. Sauf à être totalement indifférent à la crise, chacun d'entre nous est touché d'une façon ou d'une autre par ces émotions, parfois en les cumulant. Certes, mais en quoi cela nou s aide-t-il ? Si l'on ne peut décider de nos émotions, on peut, en revanche, en atténuer l'impact. A condition de les reconnaître et de les nommer. Réaliser que l'on est en colère permet d'éviter de se laisser déborder par sa colère. Il en est de même pour les émotions des autres. Pouvoir les identifier aide à s'ajuster dans la relation avec eux. L'un des enjeux pour chaque manager, dans les semaines qui viennent et qui s'annoncent secouées, va être, d'une part, de ne pas se laisser soi-même déborder par ses propres émotions et, d'autre part, d'aider ses équipes à mieux gérer les leurs. Ce qui suppose de commencer par appliquer une lecture émotionnelle sur soi et sur les autres avant de communiquer. Dans la crise, les émotions sont partout, alors apprenons à vivre avec.
Article Les Echos 4 octobre 2011